Les scientifiques ont profité de la situation pour mener de nombreuses expériences dans l’atmosphère, afin d’accroître la précision de leurs modèles et d’approfondir leurs connaissances sur la composition et la structure d’un nuage de cendres.
L’une des expériences les plus remarquables à avoir été menées est sans nul doute celle de Harrison, Nicoll, Ulanowski et Mather. Le 19 avril 2010, soit cinq jours après le début d’un regain d’activité très marqué dans l’éruption du volcan, ils ont envoyé un ballon-sonde dans le ciel écossais afin de préciser la concentration en particules et la répartition de la charge électrique en différents points du nuage.
Un compteur optique de particules a permis de relever la taille et la concentration des différentes particules, mettant en évidence une structure du nuage en couches horizontales. Un système d’électrodes a quant à lui détecté les charges électriques en présence. Les chercheurs s’attendaient à une concentration plus élevée en charges positives dans les parties supérieures et inférieures du nuage ; or il s’est avéré que celles-ci étaient également présentes avec une densité non négligeable en son centre (avec néanmoins un gradient de concentration, selon l’altitude).
Un autre enseignement qu’ont pu tirer ces chercheurs de leur expérience est que contrairement à ce que l’on pensait, la plupart des charges électriques présentes dans le nuage ne résultent que de transformations postérieures ; elles ne sont pas présentes lors de l’éruption :
Pour plus d'informations, consulter Self-charging of the Eyjafjallajökull volcanic ash plume.
La décision de fermer ou non l’espace aérien est, on le sait, directement liée à la concentration de cendres dans le nuage, du fait de leur impact sur les moteurs d’avion (consulter les questions techniques à ce propos), mais ces fameuses charges électriques présentes dans le nuage peuvent de leur côté causer des perturbations électromagnétiques pour les appareils.
Pour combler le manque de connaissances dans ce domaine, mis en lumière par l’expérience précédente, d’autres chercheurs (issus du Met Office et du Iceland Meteorological Office), à savoir Bennett, Odams, Edwards et Arason, ont étudié l’activité lumineuse (impulsions électriques avec un courant supérieur à 3 kA) du nuage de cendres volcaniques émis par le volcan, au moyen du réseau ATDnet (ATD signifiant Arrival Time Difference). Il s’agissait de relever l’intensité et la densité des flashes lumineux observés dans le nuage, dus aux charges électriques précédemment décrites, comme dans le cas d’un nuage d’orage. Le travail de ces chercheurs s’est appuyé sur des mesures réalisées au cours de deux périodes d’activité lumineuse intense : du 14 au 19 avril et du 11 au 20 mai 2010.
Il s’est avéré que ces flashes lumineux s’observaient avec une multiplicité très importante dans la région immédiate du cratère du volcan :
Les scientifiques se sont attachés à étudier puis modéliser les liens entre l’activité électrique du nuage et d’autres facteurs comme la présence de glace, la taille des particules, leur composition ou encore des paramètres de l’atmosphère ambiante.
Les résultats de ce groupe de chercheurs ont corroboré ceux de l’expérience précédente décrite plus haut, à savoir que le processus de séparation de charges s’opère essentiellement dans le nuage, une fois celui-ci constitué, et non directement en sortie du cratère.
Pour plus d'informations, consulter Monitoring of lightning from the April–May 2010 Eyjafjallajökull volcanic eruption.
Enfin, on s’est aperçu que la direction du vent joue également un rôle éminemment important dans la localisation de ces phénomènes lumineux.
Le réseau ATDnet a ainsi pu fournir des informations intéressantes sur le comportement des cendres volcaniques lorsqu’elles forment de telles masses colossales en suspension dans l’atmosphère. Néanmoins, cette méthode est inadaptée pour les structures de petite taille (les nuages de cendres doivent faire au moins 5 km de haut pour que leur intensité lumineuse soit détectée au moyen du réseau ATDnet, ce qui était le cas pour l’Eyjafjallajökull). Cet exemple montre ainsi la nécessité de développer de nouvelles techniques d’investigation pour mieux connaître les nuages de cendres volcaniques. Il est légitime d’attribuer à cette lacune une part de la responsabilité dans la prise de décision hâtive de fermer l’espace aérien au cours de l’éruption du volcan islandais.